Un regard sur la situation actuelle des Mineurs Isolés Etrangers / Mineurs Non Accompagnés (MIE/MNA)
A l’occasion de la Journée internationale des migrants, le Collectif Agir Ensemble pour les Droits de l’Enfant (AEDE) souhaite alerter quant à la situation des Mineurs Isolés Etrangers / Mineurs Non Accompagnés (MIE/MNA) en France.
Les Mineurs Non Accompagnés (MNA), auparavant appelés Mineurs Isolés Etrangers (MIE), sont considérés par la loi du 14 mars 2016 relative à la protection de l’enfant comme des « mineurs privés temporairement ou définitivement de la protection de leur famille ». Cette dénomination repose donc sur la minorité qui concerne tout individu n’ayant pas encore atteint l’âge de 18 ans accompli et sur l’isolement qui se réfère à l’absence de personne majeure, responsable légalement sur le territoire national.
Selon les rapports de la commission des affaires sociales du Sénat, de la mission MNA du Ministère de la Justice et de l’Office Français de la Protection des Réfugiés et des Apatrides (OFPRA), le nombre de ces mineurs pris en charge par les conseils départementaux était estimé à 4000 en 2010 et atteignait 13 000 en décembre 2016. En 2017, 50 000 évaluations de la minorité et de l’isolement avaient été réalisées, menant à la prise en charge de 14 908 MIE/MNA par l’Aide Sociale à l’Enfance (ASE), en hausse de 85% comparé à 2016 (8054) et 591 demandes d’asile enregistrées à l’OFPRA.
Dans son article 20, la Convention Internationale des Droits de l’Enfant (CIDE) souligne que « tout enfant qui est temporairement ou définitivement privé de son milieu familial, ou qui dans son propre intérêt ne peut être laissé dans ce milieu, a droit à une protection et une aide spéciales de l’Etat » et que « les Etats parties prévoient pour cet enfant une protection de remplacement conforme à leur législation nationale ». Or, on remarque que cet engagement étatique à la protection des MIE/MNA n’est pas assez tenu.
Face à ce constat, dans ses observations finales remises à la France en 2016, le Comité des Droits de l’Enfant des Nations Unies s’est dit préoccupé par « la situation des enfants migrants non accompagnés qui ne peuvent bénéficier ni d’une protection spéciale ni de mesures d’assistance dans l’État partie ». Ses préoccupations sont de plusieurs ordres : il souligne notamment l’insuffisante prise en compte de l’intérêt supérieur de l’enfant en tant que principe directeur dans tous les processus initiaux d’évaluation et dans les décisions ultérieures, ainsi que les difficultés qu’ont les enfants à avoir accès aux structures de protection de l’enfance, à la représentation juridique et aux services de soutien psychologique, d’assistance sociale et d’éducation. Ces carences font que des centaines de mineurs passent ainsi plusieurs mois à la rue totalement privés des droits reconnus par la CIDE et exposés à plusieurs formes d’exploitations, notamment la traite des êtres humains indépendamment des principes de la présomption de la minorité et du bénéfice du doute profitable aux mineurs.
Face à cette situation extrêmement préoccupante, nous, le Collectif Agir Ensemble pour les Droits de l’Enfant, nous recommandons :
- L’application effective de la présomption de minorité pendant toutes les procédures d’évaluation de la minorité et de l’isolement et la mise à l’abri inconditionnelle des mineurs dans des structures adaptées au cours de ces procédures et même pendant leurs recours devant le juge des enfants ;
- La suppression des tests osseux comme méthode de détermination de l’âge qui n’ont aucune fiabilité prouvée scientifiquement et qui n’apportent pas d’informations médicales suffisamment précises pour déterminer l’âge des mineurs évalués ;
- La prise en compte des documents d’identité des mineurs et la vérification documentaire conforme aux modalités de l’article 47 du Code civil pour mettre fin à une logique de suspicion systématique de majorité ;
- L’harmonisation des méthodes d’évaluation de la minorité dans les différents départements et l’orientation des mineurs vers d’autres départements en tenant compte de l’intérêt supérieur des mineurs, de leurs opinions, des structures d’accueil et de leur projet professionnel.
Le Collectif AEDE réitère que le dispositif d’accueil, d’évaluation et de mise à l’abri des MIE/MNA ne devrait pas se transformer en un dispositif de gestion de flux de nouveaux migrants arrivant sur le territoire, fondé sur la mise en doute de la parole du mineur et de recours à des examens dont la fiabilité est très contestable. Nous demandons que ce dispositif considère ces mineurs comme des enfants avant tout, en respectant des principes fondamentaux comme celui de l’intérêt supérieur du mineur et en leur garantissant tous les droits régis par la CIDE sans discrimination aucune.